Récit de passion et passion du récit
Le
but de cette communication est d’entreprendre
un rapide tour d’horizon des implications, pour la théorie du récit,
des nouvelles orientations théoriques observables aujourd’hui dans
de nombreux secteurs des sciences humaines en direction d’une analyse
des discours (littéraires ou non), qui met en évidence la nature dialogique (ou interactive) des productions sémiotiques, ainsi
que l’intrication fondamentale entre affect et cognition, aussi bien dans la production que dans l’interprétation des textes.
Il sera ainsi question d’examiner plus précisément les rapports
qui existent entre passion et narration.
Il
nous faut d’emblée préciser en quelques mots
l’usage que nous ferons du terme passion,
qui se réfère ici à un phénomène affectif d’ordre général,
une forme de pathos qui
met en lumière la « passivité » du sujet, la dimension affective de son expérience. Non pas tant que cette « passivité » serait
nécessairement opposée à une « activité » dans le sens
ou elle exclurait cette dernière : il s’agit bien plutôt de
mettre l’accent sur le fait que l’intentionnalité, qui part du
sujet et qui est dirigée vers l’objet, est ici inversée de sorte
que l’on s’intéresse davantage à la résistance qu’oppose l’objet
au « vouloir » et au « pouvoir » du sujet,
que l’on se penche sur la manière dont cet objet affecte le sujet. C’est la relation entre l’agir et le pâtir qui fera l’objet
d’une attention particulière, et nous montrerons qu’il est difficile
de penser l’un indépendamment de l’autre. Dans cette perspective,
s’il est question d’action, cette dernière sera envisagée essentiellement
comme une forme de réponse du sujet à une forme de questionnement ou de crise
qui lui vient de l’extérieur.
En fait, dans
notre approche de la narrativité, les dimensions
active et passive, loin de s’opposer, se complètent et s’éclairent
mutuellement et nous verrons notamment que, dans l’interprétation
d’un récit, l’activité cognitive anticipatrice (sous forme de pronostic ou diagnostic), est en quelque sorte activée par la réticence textuelle manifestée dans la « mise en intrigue » des événements,
et cette réticence vise à exciter
la curiosité de l’interprète
ou à produire du suspense, à l’intriguer, à l’impliquer
d’une manière ou d’une autre dans l’histoire, c’est-à-dire à accentuer
la dimension « passionnante » du texte en entretenant
une incertitude provisoire. Nous verrons ainsi qu’il est nécessaire
de repenser la corrélation entre ces deux faces, active et passive,
qui se manifestent au sein de chaque événement, et notamment dans
l’activité interprétative d’une fiction intrigante. Ainsi que l’affirme
Ricœur, l’« esthétique », en tant que théorie de l’actualisation
du texte par une conscience, a pour thème « l’exploration
des manières multiples dont une œuvre, en agissant sur un lecteur,
l’affecte. Cet être affecté a
ceci de remarquable qu’il combine, dans une expérience d’un type
particulier, une passivité et une activité, qui permettent de désigner
comme réception du
texte l’action même
de le lire » (Ricœur 1985 : 303).
Nous
voudrions enfin préciser que le terme « événement » ne
sera pas pris dans le sens de l’opposition classique entre événement
physique et action associée à un agent humain, telle qu’on la trouve
thématisée par exemple dans la philosophie analytique (cf. Revaz
1997), mais bien dans le sens de « ce qui fait événement » dans
la vie, c’est-à-dire ce qui se manifeste par une « saillance » et
qui constitue le « racontable » du récit.
La « mode » des émotions
en analyse du discours
La
récente et spectaculaire réorientation de
la sémiotique greimassienne en direction d’une « sémiotique
des passions » est particulièrement symptomatique de ce changement
de cap dans les sciences humaines qui a remis les émotions à la
mode (cf. Greimas & Fontanille 1991 ; Hénault 1994 ;
Sadoulet 1995 ; Fontanille & Zilberberg 1998 ;
Fontanille & Bordron 2000). Un point crucial que soulèvent
ces travaux tient à la mise en évidence d’une corrélation fondatrice, à la
racine de la schématisation narrative, entre la tension caractérisant
l’événement et l’extension engendrant le procès :
[Au
niveau] de la transformation discursive, la forme sensible est
celle de l’événement,
caractérisé par son éclat et sa saillance, et sa conversion intelligible
et extensive engendre le procès,
souvent défini comme un « entier » quantifiable et divisible
en aspects ; inversement, le procès n’est saisissable pour
le sujet du sentir que s’il est modulé par l’intensité qui
en fait un événement pour l’observateur. La corrélation fondatrice
de la schématisation narrative du discours serait donc celle-ci :
événement ó procès
intensité extensité
(Fontanille & Zilberberg 1998 :
77)
A travers l’affirmation de cette corrélation
fondatrice, la question de la tension narrative peut dès lors revenir au cœur d’une réflexion sémiotique
sur la narrativité, et cette approche « passionnelle » du
discours et de sa schématisation recoupe les préoccupation de nombreuses
autres disciplines connexes.
Du côté de la linguistique, le passage d’une linguistique structurale à une linguistique énonciative s’est également
accompagné d’un regain d’intérêt pour l’analyse des marques
de l’émotion dans la langue et
par la réhabilitation des travaux de Charles Bally et de Roman
Jakobson. Jakobson affirmait en effet que la « fonction émotive,
patente dans les interjections, colore à quelques degrés tous
nos propos, aux niveaux phonique, grammatical et lexical » (1963 :
215) et Jean-Michel Adam (à paraître) rappelle « l’intérêt,
pour la théorie de l’argumentation contemporaine, qui (re)prend
en compte la théorie du pathos, d’une linguistique énonciative » qui se penche
sur la question « des émotions et de l’affectivité dans
la langue ». L’essor des approches interactionniste et pragmatique a par ailleurs
mis en évidence le fait que certains éléments du texte et du
contexte fonctionnaient comme des inducteurs d’émotion chez l’interprète
(cf. Plantin, Doury & Traverso 2000). Mais cette réflexion
sur la dimension émotionnelle et interactive de l’interaction
verbale n’est pas nouvelle et se trouve déjà esquissée dans la
fameuse étude de William Labov (1978) qui visait à mettre en évidence
les nombreux « procédés évaluatifs » dont se servent
les locuteurs pour justifier la pertinence de leurs récits :
Dès lors qu’un événement devient plus ou moins
commun, qu’il cesse de violer une règle de comportement établie,
il perd son caractère mémorable. C’est pourquoi le narrateur, soumis
qu’il est à la pression sociale, se sent toujours contraint de
bien montrer que les événements vécus par lui étaient vraiment
dangereux et inhabituels, ou que la personne dont il parle a réellement
enfreint les règles d’une façon grave et digne d’être rapportée.
Bref, ce que disent les procédés évaluatifs, c’est [que] c’était
tout le contraire du banal, du quotidien, de l’ordinaire. (Labov
1978 : 475-476)
L’approche de Labov souligne donc non seulement qu’il est nécessaire
de tenir compte de l’articulation du récit avec sa situation énonciative
- l’interaction verbale, directe ou différée, au sein de laquelle
il se déroule - mais également de la nature « passionnante » de
ce qui est narré, qui doit être conforme à la règle conversationnelle
de la pertinence. Jean-Paul Bronckart (1996) souligne lui
aussi le fait que le statut dialogique de la séquence narrative
(même, et surtout, dans le dialogisme différé propre aux textes
littéraires) dépend avant tout de la production d’une tension donnant du « relief » au discours et assurant
sa « mise en intrigue » et sa pertinence au niveau de
la relation interlocutive. Ce point de vue est repris et développé par
Robert Bouchard (1996), qui distingue les textes à « tension
externe », c’est-à-dire ceux qui permettent de résoudre une
tension déjà présente dans l’interaction, comme par exemple les
notices de montages ou les recettes de cuisine, des textes à « tension
interne », dont les récits de fiction seraient particulièrement
représentatifs.
Parallèlement à ces
travaux, qui insistent sur la force de la parole, sur son rapport avec un contexte pragmatique
et interactif, il faut signaler également le retour de la rhétorique
dans le champ de l’analyse de discours car, comme le résume Claudia
Caffi, « au fond, la rhétorique tout entière peut être conçue comme
un inventaire infini de dispositifs produisant des émotions » (2000 :
89). Cette approche du discours qui insiste sur les moyens à disposition
de l’orateur lui permettant de produire du pathos trouve
d’ailleurs un prolongement spécifiquement narratif dans la notion
de catharsis, cette fonction du discours qui avait été définie,
dans la Poétique d’Aristote, comme
un effet d’épuration des passions constituant la finalité des
arts mimétiques. La tradition rhétorique et poétique héritée
d’Aristote a été élargie, modernisée et réinscrite au cœur des
questions narratologiques par le biais notamment des travaux
de Meir Sternberg (1978 ; 1990 ; 1992), qui distingue,
parmi les effets poétiques engendrés par le récit, trois modalités
principales, liées chacune à différents « modes d’exposition » de
l’action : le suspense (qui dépend d’une narration chronologique), la curiosité (qui est produite par une exposition retardée et énigmatique)
et la surprise (qui
fait surgir soudainement une information qui nous avait été dissimulée).
Les propositions
théoriques de Sternberg ont également donné naissance,
dans le cadre des travaux d’orientation cognitiviste, à la « structural-affect
theory » qu’ont développé Brewer et Liechtenstein (1982)
et qui est venu donner une assise empirique et psychologique à l’analyse
stylistique portant sur les modes d’exposition du récit (cf. également
Jose & Brewer 1985 ; Brewer 1996). Toujours dans le champ
des sciences cognitives, et dès 1979, Beaugrande et Colby ont attiré l’attention
sur certains aspects formels rendant les récits plus « intéressants »,
et donc plus « résistants » dans la mémoire des sujets,
aspects qui portent essentiellement sur la gestion d’une incertitude
provisoire du texte : « Information is often withheld
about linkages of states or events, either because it is inferrable
or in order to maintain uncertainty and interest » (1979 :
48). Ce point de vue était également partagé par Van Dijk (1976)
qui soulignait que le récit, pour être acceptable, devait décrire
un cours d’événement imprévu dans lequel l’intention du sujet était
contrariée d’une manière ou d’une autre. L’intention et sa structure
téléonomique sont d’ailleurs au fondement de la théorie du « schéma » développée
par Mandler et Jonhson et qui a connu un succès important dans
le champ de la psychologie cognitive. Plus récemment, Michel Fayol
(2000) a montré que le récit porte généralement - dès lors qu’il
atteint un certain degré d’élaboration dans le développement ontogénétique
du sujet parlant - sur la transgression d’un « script »,
c’est-à-dire sur la rupture d’une routine instituant un développement
actionnel prévisible.
Lorsqu’un événement inattendu survient ou qu’un
obstacle surgit, le déroulement des faits ne suit pas un décours
habituel. Cette situation devient un objet potentiel de narration
[…]. Le caractère inhabituel des faits est perçu et construit comme
entraînant une réaction et une (ou plusieurs) action(s) du « héros » de
l’histoire visant à rétablir la situation initiale ou à la modifier
pour s’adapter. (Fayol 2000 : 195)
Du côté des théories de la réception, Hans-Robert Jauss (1979)
a pour sa part réactualisé l’étude de la catharsis (en relation avec la poiesis et l’aisthesis), et cette ouverture, enrichie par une perspective psychanalytique,
a été poursuivie notamment par les travaux de Michel Picard sur
les fonctions ludiques du récit et sur la question l’immersion
dans des univers fictionnels. Cette question de l’immersion a
fait par ailleurs l’objet d’analyses récentes dans une perspective
plus cognitiviste, notamment dans l’ouvrage que Jean-Marie Schaeffer a
consacré à la fiction (1999) ou dans les travaux de Mary-Laure
Ryan sur les rapports entre fiction et réalité virtuelle (1994 ;
2004). Dans un entretien publié sur Vox Poetica,
Jean-Marie Schaeffer précise d’ailleurs, au sujet des
travaux qu’il a consacré à l’immersion ludique dans les mondes
possibles de la fiction, que les fonctions cognitives sont indissociables
de la dimension affective : « Ce terme [cognitif] est
souvent lié à l’opposition cognitif / affectif. Or, quand je dis "fonction
cognitive", c’est une cognition qui est saturée affectivement.
Il me semble qu’il n’y a que cette cognition-là qui soit effective
dans la vie réelle. Seules les croyances qui sont saturées affectivement
guident nos actions. »
Représentation d’actions ou représentation de passions ?
Toutes ces
perspectives plus ou moins convergentes que nous venons de passer
en revue rendent possible une approche
renouvelée de
la narrativité dans laquelle la dimension passionnelle (ou passionnante) des événements relatés, ainsi que les traits du suspense, de la curiosité ou de la surprise, qui sont intimement liés au phénomène de la « mise
en intrigue » et à la tension interne du discours (que nous baptisons : tension narrative) peuvent enfin (ou peuvent à nouveau) jouer les premiers rôles. Pourtant, il semble bien
que cette dimension passionnelle de la narrativité demeure encore
soit partiellement occultée, soit marginalisée, et cela pour des
raisons aussi bien idéologiques qu’esthétiques, et nous aimerions
brièvement revenir sur les raisons probables de cet état de fait.
En effet, la
critique marxiste et l’esthétique moderniste de « l’art
pour l’art » ont longtemps rejeté dans les marges ces traits
du récit : la tension ou
le suspense étaient jugés comme des artifices racoleurs ne pouvant
servir qu’une finalité commerciale et connotant nécessairement
des œuvres populaires et déclassées (sur cette question de la « valeur
littéraire du suspense », cf. Baroni 2004a). De ce point de
vue, le retour de l’intrigue et le brouillage des valeurs dans
l’esthétique postmoderne sont probablement aussi fondamentaux dans
la possibilité qui est aujourd’hui offerte de remettre en avant
la dimension passionnelle de la narrativité, que l’émergence d’une
sémiotique des passions, le retour de la rhétorique et le passage à une
linguistique énonciative et pragmatique.
On constate
en effet que les avancées réalisées notamment par
Barthes (1970 : 1973), Genette (1972) ou Grivel (1973), ont été longtemps
limitées par l’esthétique dominant le champ artistique de leur époque.
Pour Grivel par exemple, son analyse de l’intérêt romanesque ne
pouvait porter que sur un corpus d’œuvres restreint, composé de
romans « populaires » qui s’étalaient entre 1870 et 1880,
il ne s’agissait donc nullement d’une analyse narratologique à visée
généralisante, mais bien d’une analyse ayant une connotation fortement
historique. Quant à Genette (1972), Sternberg (1992) a montré que
sa focalisation sur les distorsions temporelles dans l’œuvre de
Proust dépendait de la valorisation d’une esthétique de la complexité,
et qu’elle était également tributaire d’un déclassement a priori des récits chronologiques visant la production d’un
certain suspense.
Barthes, pour
sa part, a décrit dans S/Z (1970) et dans Le Plaisir du texte (1973) les codes qui structurent le récit selon une
logique irréversible (codes herméneutique et proaïrétique qui s’apparentent
aux effets de curiosité et de suspense) mais,
en même temps, il a condamné la lecture linéaire comme une perversion
(une forme de voyeurisme) et un asservissement à la logique économique
du marché des biens symboliques pour valoriser à l’inverse une
esthétique de la relecture :
la lecture « étoilée » et totalement réversible. « Ce
qui bloque la réversibilité », affirme-t-il, « voilà ce
qui limite le pluriel du texte classique. Ces blocages ont des
noms : c’est d’une part la vérité et d’autre part l’empirie :
ce précisément contre quoi ----- ou entre quoi- - s’établi le
texte moderne » (1970 : 33). Si l’analyse d’une œuvre
balzacienne permet d’éclairer ces traits passionnels de la narrativité qui
orientent le texte de son nœud vers son dénouement, il est donc
affirmé que ces « blocages » de la réversibilité et
de la pluralité interprétative ne caractérisent qu’une esthétique
classique révolue. Là encore, on ne toucherait donc pas à un
trait fondamental de la narrativité.
Bien que la
dimension passionnelle ou « tensive » apparaisse
aujourd’hui, pour de nombreux auteurs (p. ex. Sternberg, Brewer,
Picard, Jouve, Bronckart, Bouchard, Fontanille, Zilberberg, etc.),
comme un trait fondamental de la narrativité, et bien que les émotions
soient revenues à la mode dans de nombreux secteurs des sciences
humaines, il nous semble malgré tout que l’on assiste encore à une
certaine résistance dans le renouvellement de la définition du
récit, de sa nature et de sa fonction anthropologique. Peut-être
cette résistance tient-elle, ainsi que nous l’avons suggéré, à la
difficulté de surmonter certains préjugés esthétiques condamnant,
dans le domaine des arts, le recours à des effets émotionnels ;
mais il y a probablement une cause plus profonde et plus théorique à cette
situation : le récit conçu, depuis Aristote, comme une imitation
d’action (une mimèsis praxeos) semble, par sa nature même, mettre au premier plan
la dimension active de
l’expérience. La dimension passive apparaît
alors comme l’apanage d’autres modes d’expression qui ne sont pas a
priori narratifs, tels que
le lyrisme par exemple, qui s’oppose à l’épopée ou à la tragédie.
Par conséquent, c’est bien la logique de l’action (cf.
Bremond), avec sa dynamique projective configurant une temporalité,
par opposition à la question apparemment statique des états ou des passions, qui a longtemps occupé l’avant-scène de la réflexion de la narratologie
structuraliste.
Mais une telle
opposition masque le fait que l’activité et la passivité, la cognition et l’émotion, sont des dimensions indissociables au sein des phénomènes,
qu’elles sont présentes dans chaque événement, dans chaque représentation
ou dans chaque discours produit ou interprété. Ainsi que l’affirmait
Ricœur dans un entretien avec Greimas autour de la sémiotique
des passions : « D’un point de vue phénoménologique
on ne peut rencontrer le problème du pâtir que si on a affaire à des êtres "agissants".
[…] Si nous n’étions simplement que des êtres mécaniques, si
nous n’étions pas les auteurs de nos actions, capables de passer
par les modalités du vouloir et du pouvoir, nous ne saurions
pas ce que c’est que les passions. C’est à des êtres agissants
qu’il arrive ce quelque chose : souffrir » (Hénault
1994 : 211).
Entreprendre
une action, c’est se heurter à une résistance potentielle,
c’est prendre le risque d’échouer dans l’actualisation de son intention.
Quand ce risque apparaît nul, quand on nage en pleine routine,
il n’y a rien à raconter, le monde est absent, il n’y a pas événement,
le temps est réduit à une simple répétition, à un éternel retour
du « présent-absent ». Au contraire, lorsque l’action
est menacée dans son accomplissement, lorsqu’elle est contrariée
d’une manière ou d’une autre, lorsque l’on est amené à produire
des pronostics incertains sur son succès ou son échec, alors l’événement devient
sensible et la temporalité s’approfondit, nos pronostics luttent
contre un futur écrasant de sa présence. De même, lorsqu’on nage
en plein brouillard, lorsqu’on ne parvient plus à distinguer les
objets, les êtres ou à saisir le sens de leurs actions, nos diagnostics s’opposent à un présent ou à un passé lourds de mystères. Il se passe quelque
chose et cela mérite peut-être
d’être raconté, et pas seulement décrit ou expliqué.
Prendre en
compte la dimension passionnelle du récit revient ainsi à concevoir
que la narrativité consiste précisément en la mise en scène de
l’indétermination du monde et/ou du devenir, c’est le lieu où l’action
se représente dans son incertitude, le lieu où peuvent être explorées
les obscurités du monde et du futur dans lesquelles s’enracinent
nos angoisses et nos espoirs. Mais c’est aussi le lieu où le monde
manifeste sa présence, son extériorité, le lieu où les actions
apparaissent comme la réponse à une « crise », le lieu
où les composantes de l’action et l’identité du sujet peuvent émerger à travers
le temps, se détacher du fond aveuglant de nos routines quotidiennes :
les contours de l’agir se dessinent grâce à l’ombre projetée par
ce qui résiste à notre pouvoir et cette ombre se maintient dans
la lumière qu’apportent nos schèmes prévisionnels et explicatifs.
Perspectives
pour un renouvellement des questions narratologiques…
Une narratologie
renouvelée par la prise en compte des dimensions
affective et interactive pourrait prendre plusieurs directions :
un pôle focalisé sur la réception mettrait notamment en évidence les phénomènes qui
rendent un récit passionnant,
il pourrait également examiner les diverses modalités selon lesquelles
l’affect initial, qui se trouvait à l’origine du récit, se prolonge,
trouve une résonance chez l’interprète, que ce soit sur un plan économique
(le récit passionnant fait vendre) ou sur un plan rhétorique (le récit émouvant fait agir) ; du côté de la production, il serait possible d’éclairer l’articulation entre
l’événement et sa narrativisation, le récit rejouant dans sa structure
discursive, mais sans la reproduire à l’identique, la rupture instaurée
par l’événement vécu, qui se noue et se dénoue ; enfin, la
différence entre la crise vécue et
la crise racontée met
en tension une visée totalisante et compréhensive du discours (qui
tente de s’approprier l’événement saillant ou imprévu, de le domestiquer,
de colmater la brèche ouverte par la « crise » ou par
l’« intrusion » d’autrui) avec une visée éthique qui
pose l’exigence d’une fidélité de la parole au vécu, et qui renonce
par conséquent à intégrer ce dernier, dans un mouvement rétrospectif
visant une explication ou une compréhension.
Au fondement
de la production narrative de nature factuelle, on pourrait donc
mettre en évidence une forme de nouement liée à une
crise, une tension existentielle mettant en jeu l’indétermination
du monde et/ou du futur, qui trouverait une réponse dans la production
narrative. Dans Pourquoi nous racontons-nous des histoires ?,
Bruner insiste précisément sur ce point :
Concevoir
une histoire, c’est le moyen dont nous
disposons pour affronter les surprises, les hasards de la condition
humaine, mais aussi pour remédier à la prise insuffisante que nous
avons sur cette condition. Les histoires font que ce qui était
inattendu nous semble moins surprenant, moins inquiétant :
elles domestiquent l’inattendu, le rendent un peu plus ordinaire. "Elle
est bizarre, cette histoire, mais elle veut dire quelque chose,
non ?" : il nous arrive de réagir ainsi, même en
lisant le Frankenstein de Mary Shelley. (Bruner 2002 : 79-80)
La narrativité peut ainsi être définie fonctionnellement (au niveau
anthropologique) comme la conversion d’une tension existentielle en une tension narrative, comme la transfiguration d’un trait passionnel de l’événement vécu en un trait passionnant de l’événement raconté. L’ancrage de la narrativité dans
un fond humoral est certainement un point fondamental dans le domaine
des récits factuels, et si « raconter sa souffrance » peut
fournir l’occasion de produire un discours passionnant pour
autrui, c’est aussi et surtout, ainsi que le suggèrent Maury-Rouan
et Vion (1994), un moyen pour soi d’avoir prise sur cette souffrance, de lui donner
un sens.
Par ailleurs,
du côté de l’interprète cette fois, la tension existentielle
se distingue de la tension narrative du fait que la réticence manifestée
par la mise en intrigue est perçue comme une réticence provisoire
contenant la promesse d’une résolution harmonieuse, d’une résolution
dont la responsabilité incombe à quelqu’un d’autre (le narrateur)
qui connaît la fin à l’avance et qui a agencé les événements dans
le but précis d’atteindre cette « fin ». Le dénouement
attendu définit la possibilité émergente d’une compréhension, d’un « prendre
ensemble » du segment existentiel formant une totalité signifiante :
le récit thématise le monde et sa dynamique est alternativement
projective et rétrospective.
Se pose alors
la question des conditions de possibilité d’une « intrigue » qui
aurait pour objectif de rester fidèle à l’événement dans lequel
elle s’enracine, d’un récit (récit factuel, autobiographie ou récit
de vie) qui, par conséquent, renoncerait à trahir l’événement en
le thématisant, en convertissant les personnes en personnages (ou, pour reprendre une terminologie de la narratologie thématique :
en « rôles », en « acteurs » ou en « actants »),
en écrasant sa temporalité et en surmontant sa « discordance » initiale
(cf. Ricœur) par la structure « configurante » ou « concordante » d’une
totalité fermée. Il y a bien une contradiction entre la visée pragmatique de la production narrative, en tant que réponse à une « crise » -
cette tendance à la construction d’une signification dont parle
Bruner - et l’exigence éthique d’une fidélité du
discours par rapport à un événement que l’on sait irrécupérable,
dont l’origine et les conséquences se perdent à l’horizon, dans
lequel nous ne sommes pas seuls impliqués, et au sein duquel nos
actions apparaissent comme une forme de réponse à un affect, à une
injonction venue de extérieur.
Le récit qui vise à rester fidèle à sa
source devrait se tenir dans cette tension entre le besoin de faire
la lumière sur ce qui est arrivé et la nécessité de préserver
la part d’ombre où se
tient l’Autre, un Autre qui n’est pas ramené au Même, mais qui
manifeste au contraire son altérité et l’extériorité de son point
de vue par sa résistance à notre pouvoir, Autrui qui surgit comme
Adversaire ou comme Sujet du Désir, Autrui qui noue une intrigue
avec nous et qui se trouve également à la racine de la prise de
parole parce qu’il nous a requis par sa présence. Michel Vanni
(2004), dans une réflexion qui recherche à réconcilier la pensée
de Lévinas avec la praxis, suggère ainsi que le schème du récit
serait, malgré sa tendance configurante, adéquat pour transcrire
le mouvement de la réquisition par autrui qui est au cœur de l’éthique.
Il affirme qu’il est ainsi possible d’entendre la série temporelle
du récit comme un prolongement de l’affect - et non pas comme une
structure formelle se retournant sur l’affect pour l’intégrer -
un prolongement sans retour, pur “envoi” et il conclut qu’on peut
considérer la crise ou la mise en question provoquée par l’effraction
de l’autre, comme une sorte « d’embrayeur de récit ».
Nos propres
recherches (cf. Baroni 2002b ; 2004a ; 2004c ;
2005b ; à paraître) se présentent comme une tentative de repenser
le concept de séquence narrative.
L’accent est mis sur le fait que c’est par le biais d’une tension
interne que le récit se structure
séquentiellement, qu’il inscrit
les événements dans une totalité, d’abord attendue, puis finalement
réalisée. Ainsi que le remarque Jean-Paul Bronckart : « S’il
est rarement posé comme tel, le statut dialogique de la séquence
narrative est néanmoins évident. […] Cette séquence se caractérise
toujours par la mise en intrigue des événements évoqués. Elle dispose ces derniers
de manière à créer une tension,
puis à la résoudre, et le suspense ainsi établi contribue au maintien
de l’attention du destinataire » (1996 : 237).
La tension narrative est
donc ce qui survient lorsque l’interprète d’un récit est encouragé à prévoir
et à attendre un dénouement, cette attente étant
caractérisée par une anticipation teintée d’incertitude. La tension narrative contribue
au phénomène de la mise en intrigue, elle dépend d’une certaine « réticence » du
texte à fournir une information que l’interprète souhaiterait
connaître d’emblée, et cette tension interne structure et oriente
séquentiellement le discours tout en assurant en même temps sa
pertinence au niveau de la relation interlocutive. Nous avons
dégagé, à la suite des travaux de Sternberg, deux modalités thymiques
principales de la tension narrative : le suspense et
la curiosité. La curiosité se définit comme un effet qui découle
d’une représentation énigmatique de la situation narrative, alors
que le suspense dépend pour sa part d’une incertitude qui porte
sur le devenir d’une action, dont la représentation respecte
au moins partiellement la chronologie. La chronologie, quand
elle contribue à produire une tension, apparaît ainsi comme une réticence du
texte, car elle retarde l’exposition d’un élément du discours
que l’interprète voudrait connaître d’emblée. Cette approche
qui tient compte à la fois de la structure de l’action prise
en charge par le récit, des modes de textualisation de celle-ci
et des effets poétiques qu’elle contribue à produire, consiste
par conséquent en une tentative de réconcilier la narratologie
thématique (type Bremond) avec la narratologie formelle (type
Genette) alors que la tradition les a longtemps opposées.
La logique
actionnelle sous-jacente au récit, que les structuralistes
concevaient comme l’architecture immanente du texte, se double
ainsi d’une saisie impressive, qui lui est indissociable et qui
se développe au cours du processus interprétatif sur la base de
la rencontre entre un mode de textualisation spécifique, marqué par
une réticence stratégique, et une activité protensive d’anticipation
qui s’oppose à cette réticence. Ce qui permet de déterminer les
lieux où le texte se noue et se dénoue, ce sont par conséquent
les interrogations que produit l’interprète en un point donné du
récit et les pronostics et les diagnostics qu’il établit afin de compenser cette relative perte
de contrôle dans l’interaction discursive qui est liée à une réticence
du texte. Naturellement, les schémas anticipés sont souvent contredits
par le texte, qui parvient ainsi à nous surprendre et nous oblige à objectiver nos attentes et à les
corriger. La dynamique polarisée du récit, ainsi que l’a clairement
exprimé Umberto Eco (1985), met en jeu deux plans de structuration :
une structure anticipée et
une structure actualisée,
qui ne se recoupent pas nécessairement, et c’est de la tension entre ces deux structures que peut émerger le sens du texte. La surprise, en relation avec la tension narrative, apparaît dans cette approche comme l’une des fonctions
heuristiques majeures que l’on peut associer à la narrativité ;
elle repose sur un processus de méta-abduction résultant d’une
abduction qui s’est avérée malheureuse dans le processus interprétatif
(cf. Eco 1986).
Le dispositif
narratif ne rythme effectivement le discours et ne tient en haleine
l’interprète, que dans la mesure où l’attente
est vécue dans une passivité relative, dans la conscience d’une incertitude liée à une réticence lisible dans le texte et à un caractère ouvertement
imprévisible (le pacte de lecture implique que l’histoire doit être
en mesure de surprendre). Cette réticence, qui est donnée comme
provisoire, produit alors une tension interne qui
confère du relief au discours et qui oriente l’interprétation par
l’attente d’un dénouement à venir. C’est cette double dialectique
qui apparaît fondamentale dans la mise en intrigue : d’une
part celle qui résulte du rapport, dans l’interprétation, entre émotion et cognition,
ou entre incertitude et anticipation, et d’autre part celle qui existe entre la réponse anticipée de
l’interprète et la réponse effective du
texte, dont pourra éventuellement émerger une surprise mémorable.
Ce rapide inventaire
ne représente que les premiers jalons, posés
par plusieurs chercheurs d’origines diverses, pour une réflexion
portant sur les rapports entre passion et narration. De nombreuses
autres extensions pourraient être envisagées :
- une
approche passionnelle de
la narrativité pourrait conduire à reformuler la distinction entre « histoire » et « discours » formulée
par Benveniste, qui a longtemps masqué la dimension proprement
dialogique, pragmatique et énonciative de la mise en intrigue dans
les fictions littéraires ;
- la
question de la fidélité des récits autobiographiques à un vécu,
largement critiquée par les courants constructiviste et textualiste,
pourrait aussi faire l’objet d’un réexamen à la lumière de l’ancrage
du récit dans un corps et dans un affect dont l’origine est située à l’extérieur
du sujet ;
- d’autres
modalités de la tension narrative que celles qui dépendent de la dialectique entre anticipation et incertitude pourraient également être explorées : par exemple,
on pourrait montrer que, dans le genre tragique, le caractère inéluctable
du dénouement ne neutralise nullement la tension, car cette dernière repose essentiellement sur la
contradiction entre un savoir et
un vouloir, c’est-à-dire,
dans un langage aristotélicien, sur la pitié davantage
que sur la crainte ;
- il
faudrait enfin s’interroger sur le sens particulier que prend la « fin-en-suspens » qui
caractérise les récits de vie (racontés par des vivants !), mais également
de nombreux récits d’actualité ouverts
sur la sérialisation (dans la presse ou les médias audio-visuels),
les feuilletons littéraires et de nombreux récits littéraires plus
ou moins déceptifs ; une telle « fin-en-suspens » s’oppose
en effet à la « clôture classique » et à la position
distanciée et rétrospective que l’on observe dans les genres narratifs
qui ont retenu la plupart du temps l’attention exclusive des narratologues, à savoir
la fiction littéraire et l’historiographie.
Sur ce dernier point, la confusion entre configuration (essentiellement rétrospective, voire atemporelle)
et mise en intrigue (essentiellement
projective, accentuant la temporalité du discours), confusion
que l’on doit essentiellement à l’acception extrêmement large
de la notion d’intrigue qui s’est popularisée par le biais des
travaux des historiens ou philosophe « narrativistes » (cf.
Veyne, Danto, Mink, White, Ricœur, etc.), pourrait également être
questionnée. Ainsi que l’affirme Louis O. Mink, la configuration tend à gommer
le caractère progressif de la lecture, elle tend également écraser
la temporalité de l’événement relaté : « The more one
comes to understand the actual relations among a number of events,
as expressed in the story or stories to which they belong, the
less one needs to remember dates. » (Mink
1969-1970: 555). A l’inverse, notre approche « passionnelle » de
l’intrigue souligne que cette dernière possède un caractère irréductiblement
temporel lié à son actualisation par un interprète : elle établit
une tension interne dans
l’interprétation (même dans la réitération), elle accentue l’attente d’un dénouement et contribue à polariser et à creuser la temporalité du discours en direction du futur,
que ce soit par une forme quelconque de « réticence » textuelle
nous contraignant à anticiper le dévoilement d’une information
provisoirement cachée, ou par l’évocation d’un événement saillant
et imprévisible, qui apparaît dans toute son épaisseur chronologique.
Universités
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Article publié le 15 décembre 2005